j'étais esthéticienne de métier (ndlr Hélène a gardé les gestes de son ancien métier et on retrouve ces attentions dans le travail de peinture.) et Guillaume travaillait dans l'immobilier.
Ma belle mère faisait de la location saisonnière et les santons pendant ses loisirs. Elle faisait un très joli travail, mais elle surmoulait et recopiait des modèles. Elle nous a proposé de reprendre ses moules quand la charge de travail a été trop lourde ; elle n'arrivait plus à produire de grands modèles qui sont plus difficiles à réaliser, car ils demandent beaucoup de travail, un coût, du temps et surtout une dextérité, ce qui n'est pas toujours intéressant financièrement.
Notre apprentissage a été long et on a mis 3 ans à apprivoiser ces moules.
Nous avons eu la chance de rencontrer Patrick Naudin, professeur à l'école de céramique d'Aubagne. Il a été santonnier pendant 10 ans avant de se tourner vers l'enseignement. Il nous a appris à faire des moules et nous a transmis son savoir. C'est à lui qu'on a acheter nos moules les plus modernes. Nous voyons maintenant notre évolution sur les modèles et le travail de la couleur.
Vous avez deux types de santons, des anciens et des contemporains, comment fait on un modèle de santon ?
Nous avons petit à petit éliminé les reproductions, les modèles surmoulés. Nous avons voulu assainir notre collection et cela nous a demandé beaucoup d'efforts financiers. Nous avons créer une gamme en achetant des moules aux grands collectionneurs, Comme M Faisant qui est le grand spécialiste du 18ème sur Aubagne, ou Patrick Naudin.
Nous avons ainsi des modèles modernes ou d'époque 1900.
Nous sommes aussi allé voir le spécialiste de la biennale d'Aubagne à qui nous avons acheté plus d'une centaine de moules estampillé XIXè, de l'époque 1850, ce qui nous a permis de dire que nous faisons des modèles anciens.
Ces moules seraient partis dans des musées :

ceux de la région de Marseille ou Aubagne qui souhaitaient les acquérir. Ce collectionneur a en particulier une collection du premier santonnier marseillais qui ait fait des santons d'argile crue : Jean-Louis Lagnel, 80 personnages, la collection complète.
Nous sommes toujours à la recherche de modèles pour avoir une collection qui évolue en permanence.
Nous sommes maintenant présents sur une foire aux santons prestigieuse : la Foire de Sceaux à Paris.
Quelle est l'histoire du santon de Provence ?
L'origine du santon remonterait à la fin du XVIIIè début XIXè avec une influence napolitaine. On trouve ensuite une statuaire en plâtre ou en bois : les santibelli marseillais.
On raconte qu'à la révolution, les fermetures d'églises ont poussé les gens à imaginer chez eux des répliques de saints, des modèles réduits pour recréer le mystère de la nativité (Santoun signifie saint en provençal). C'est une version parmi d'autres...
On trouve des crèches de voyage avec des santons puces, de 2cm. Très vite, on a représenté des provençaux, porteurs d'offrandes avec des spécialités culinaires de chaque pays de Provence.
Jean Louis Lagnel (1764 - 1822) a représenté des personnages réels de Marseille, dans leur costume d'époque, traditionnel, avec les attributs de leur métier. Les santons deviennent un peu païens et l'Eglise ne les a pas toujours vu d'un bon oeil... Elle a parfois essayé d'interdire les santons. (Païen vient du latin "pagus" qui veut dire "pays", le sens premier du terme est "paysan" : "paganus", peut-être que l'Eglise n'aimait pas qu'on représente les gens de la campagne dans la crèche ? ).

Les créateurs ont été influencés par des pastorales, des opérettes ou pièces de théâtre, mises en scène à la période de Noël, sur le thème bien sûr de la naissance de Jésus. La plus connue était la pastorale Maurel de Marseille aux environs de 1900. Il existe toute une gamme de santons faite à partir de ses personnages. Pistachier le fada simplet et ivrogne (et non pas le vendeur de pistaches), l'aveugle qui retrouve la vue après que le bohémien lui ait ramené le soir de Noël, nuit de miracles, son fils qu'il lui avait enlevé, Grasset Grassette les amoureux...
Maintenant on trouve beaucoup plus de personnages éloignés de cette origine, comme le pêcheur breton, l'artiste peintre, ou Fernandel et Raimu dans leur interprétation de Pagnol.
Les santoniers étaient au départ des carreleurs ou plâtrier qui créaient les santons en activité secondaire. Les personnages étaient faits avec des matières bas de gamme et crues. Ils utilisaient pour la couleur une détrempe, une sorte de gouache faite avec des ocres, de la colle à poisson.
Thérèse Neveu, santonnière éminente d'Aubagne a apporté beaucoup de nouveauté dans le travail des santons, notamment la cuisson des figurines. C'est sans doute après cela que les santons ont pu voyager au delà de la Provence : ils n'étaient plus aussi fragiles en terre cuite.
La notoriété de Marcel Pagnol et de ses écrits ont contribué à l'expension de la culture provençale.
Pouvez vous nous expliquer
comment on fabrique un santon ?
Nous fabriquons les santons avec des moules anciens, les plus anciens on plus d'un siècle et demi...

Un moule est généralement en plâtre de Paris, composé de 2 parties ou plus, avec des repères permettant un assemblage parfait. Ces repères pouvaient être les initiales du santonnier. Les grands personnages sont fait avec plusieurs moules, pour le corps, les bras...

On presse une boule d’argile de haute qualité (terre rouge de Provence) dans une moitié du moule, une autre dans la seconde, on trace des rainures avec une pointe dans les deux parties et on met au pinceau de l'agile liquide (barbotine) pour coller les deux parties. On serre ensuite fortement les deux blocs assemblés, on presse au niveau du socle pour pousser la terre contre le plâtre du moule. On écrase le pied et on applique avec un tampon la marque de l'atelier, ce qui authentifie le santon. On ouvre le moule après quelques minutes de sèchage, en sèchant la terre se rétracte, diminue de volume et se détache du plâtre, on enlève le surplus de terre qu'on appelle la barbe. L'opération délicate de démoulage du personnage est faite avec le plus grand soin pour ne pas le déformer.
On ébarbe ensuite le personnage, cette phase peut être longue, et les artisans qui travaillent avec des moules modernes s'efforcent de la réduire au maximum en ayant des moules neufs, qu'ils changent tous les 100 moulages. Un système de gorges coupe et évacue automatiquement l'excédent d'argile lors du pressage.

Le séchage peut durer plusieurs heures ou plusieurs jours suivant la taille du sujet.
Quand on a réalisé assez de pièces pour remplir le four électrique, on procède à la cuisson. On peut monter la température à 1200° pour avoir une céramique parfaite, mais à 900° la température est suffisante pour nos santons.
La mise en couleur se fait à l'acrylique, la gouache est trop fragile, et à la main bien sûr. On peut aussi affiner ce travail par de nombreuses techniques, pour obtenir des motifs sur les vêtements, ou une patine sur la peinture des personnages, mais ces méthodes restent secrètes et doivent garder leur mystère !
Pour en savoir plus...
L'atelier d'Hélène est un magasin et propose aussi des stages d'initiation à la fabrication, moulage et mise en couleur de santons. Vous y trouverez aussi des santons de Provence à peindre. Chaque année, les fêtes de Noël sont l'occasion de redécouvrir tous ces personnages et de leur créer de nouvelles dispositions...
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